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Le Trait-# 45- Colette Maciet

Une certaine idée de la mode

 

Colette Maciet a travaillé comme couturière auprès des plus grands créateurs : Chanel, Karl Lagerfeld, Saint-Laurent, Givenchy, Galliano…. Un parcours singulier qu’elle raconte dans un livre « Haute couture » publié aux éditions Michel Lafon. Dans ce récit, elle nous entraîne dans l’envers du décor celui des ateliers et de celles qu’on appelle communément « les petites mains »…

Née en 1946, en Normandie, à Quetreville-sur-Sienne, issue d’un milieu modeste, elle arrête l’école à 14 ans avec le certificat d’étude en poche. Sa mère lui demande alors de choisir entre la couture et la coiffure.

Colette Maciet choisit la couture et entre chez Chanel, en septembre 1960, comme apprentie : un épisode savoureux de l’ouvrage. Elle gravit le grand escalier mythique du 31 rue cambon, intimidée, et quand elle ouvre la porte de l’atelier, elle a un choc : elles sont toutes si vieilles, écrit-elle…Elle doit aussi utiliser le téléphone pour passer les commandes mais ne sait pas s’en servir…Elle est également très intimidée par Coco Chanel qui n’était pas toujours commode.

Ce sera le début d’une longue passion. Elle raconte dans son ouvrage la hiérarchie d’un atelier de haute couture et sa volonté de gravir les échelons pour devenir « première main ». Tout est en effet hiérarchisé dans un atelier : apprentie, seconde main qualifiée, première main débutante, première main qualifiée, seconde d’atelier, enfin première d’atelier…le graal. Colette Maciet devient première d’atelier en 1977 chez Hanae Mori, seule Japonaise à avoir obtenu le label « haute couture » en France.

Comme l’écrit Ines de la Fressange, dont Colette Maciet est restée proche depuis ses années Chanel, dans la préface: « La première d’atelier reçoit les informations du couturier. C’est l’interlocutrice principale. C’est aussi la personne qui donne à chacun son travail dans l’atelier et attribue les modèles aux différentes personnes. Il faut comprendre le souhait du couturier, avoir la sensibilité pour l’imaginer et surtout le talent pour lui donner forme et parfois aussi proposer un détail que le couturier n’avait pas vu … ».

Colette Maciet raconte « l’âge d’or » de la mode, mais aussi la période qui a suivi, moins réjouissante pour les créateurs. « Pinault et Arnault se livrent à un partage des maisons. La haute couture ne relève plus de l’art mais du coup d’éclat », écrit-elle. L’ambiance change…

On sent que l’auteur avait un respect infini pour Hubert de Givenchy et se désole qu’il soit désormais considéré comme un employé et pas un créateur. Givenchy est remplacé par John Galliano. Une certaine conception de la haute couture se termine alors, estime Colette Maciet. Constat qu’elle réitère avec l’arrivée d’Alexander Mc Queen.

La haute couture devient du marketing mais, peut-être, s’ouvre-elle à un plus grand nombre (ou en donne-t-elle l’illusion avec le développement des produits dérivés).

Colette Maciet rebondit chez Saint-Laurent qui a aussi beaucoup compté pour elle. Saint-Laurent décidera  de mettre fin à sa carrière en 2002 dans un discours poignant : « Cette époque n’est plus la nôtre. La création et le marketing ne font pas bon ménage »…

Le récit est piquant, truffé d’anecdotes et reste un témoignage précieux sur une période révolue où la mode habillait 250 familles au plus.

(photo : Gilles Maciet)

Verbatim

 

« Être apprenti (e); c’est apprendre son métier, le métier de couturière ; tout ce que les premières mains ne font pas. Je ne voulais pas rester apprentie…Je voulais un diplôme, j’ai passé mon CAP ».

« Coco Chanel ne dessinait pas. Elle appelait les chefs d’atelier leur expliquait ce qu’elle voulait. C’était un travail d’équipe. Je ne pense pas que cela se passe comme cela aujourd’hui chez Chanel. Karl Lagerfeld donnait des croquis, Virginie Viard aussi».

« La mode ne relève plus de l’art, mais du coup d’éclat ».

« Je ne voudrais pas retourner dans les ateliers de haute couture, je serais déçue. Il faut que cela rapporte. Un tailleur Chanel à mon époque : tout était fait à la main… »…

Questionnaire de Proust :

Occupation idéale

La couture.

Le pays où j’aimerais vivre

La France.

Un /des Créateurs (au sens large)

Chanel, Yves Saint-Laurent, Karl.

Une couleur
Mes héros-héroïnes fiction/vie réelle

Mon mari.

Ce que je déteste le plus

Le mensonge.

Ce que j’apprécie le plus chez les autres

La sincérité.

L’état présent de mon esprit

Calme.

La faute qui m’inspire le plus d’indulgence

La gourmandise.

 

Ma devise

La persévérance.

Le monde de demain en quelques mots ?

Ni optimiste, ni pessimiste.

Dédicace

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