Le TRAIT- Episode 51 – Marine Peyre
LE TRAIT- Episode 51 – Marine Peyre. La fabrique d’un designer
Depuis son stage chez Inflate Design à Londres dans les années 90, où sa passion pour le design s’est solidement enracinée après des études d’architecture et aux Beaux-Arts de Marseille, Marine Peyre n’a cessé d’expérimenter et de se réinventer. Dans cet épisode du Trait, elle nous partage ses débuts et son parcours, animée par un enthousiasme indéfectible et une volonté de toujours aller de l’avant. Ces valeurs, dit-elle, ne l’ont jamais quittée.
Parmi ses premières réalisations, elle a lancé la marque « Cooked in Marseille », aujourd’hui disparue, qui a marqué les premières étapes de son aventure créative. Sa démarche était ancrée dans le désir d’explorer ce qu’elle appelle un « design contextuel ». Concrètement, elle se demandait : est-ce que l’esthétique d’une ville, d’une région ou d’un pays, ses formes, couleurs et matières peuvent être retranscrites à travers un objet ou un mobilier ? L’idée se traduisait par une gamme ludique dans l’esprit du Tupperware, avec des créations en silicone. Marine Peyre a toujours eu à cœur de détourner les usages traditionnels des produits.
Cependant, cette aventure s’est arrêtée lorsqu’elle a refusé de produire des objets « made in China », alors que les produits en silicone chinois envahissaient le marché européen.
Cherchant à dépasser l’objet, Marine Peyre a souhaité se tourner vers l’espace. Sa formation aux Beaux-Arts lui a offert une grande liberté créative et cultivé son goût du concept, un élément essentiel dans ses créations actuelles.
Elle considère que l’humilité est la qualité principale d’un bon designer. « Il ne s’agit pas seulement de faire un beau dessin, mais de se demander si le projet est réalisable, quel matériau il faut inventer, et comment travailler avec les équipes pour le rendre concret. Le coût de fabrication et le prix de vente doivent être cohérents », explique-t-elle.
Marine Peyre nous dévoile également la réalité du métier de designer indépendant, sans éluder les difficultés que cette profession engendre, notamment le fait qu’elle n’est pas aussi bien référencée que celle d’architecte par exemple.
VERBATIM
« Je voulais me lancer dans un métier créatif sans savoir lequel. L’architecture m’est apparue comme un tout : assimilation de références, techniques, dessins, constructions. J’y ai tout appris. Cela m’a ouvert les yeux sur le design.
-En 3e année d’architecture, je me suis retrouvée face à des contraintes techniques : la construction d’un bâtiment, ce qui était assez rébarbatif. Je voulais quelque chose de plus palpable, que je pouvais maîtriser : l’échelle de l’objet, à taille humaine. Je fais aujourd’hui beaucoup de mobilier. Je voulais inventer un vocabulaire de formes qui amène à l’usage.
-Ma base d’inspiration est ce que j’appelle « le non-design » : j’aime détourner les objets.
-Cooked in Marseille, c’était l’esprit de la plage du Tupperware. On a travaillé toute une gamme de produits en silicone, colorés, transcendés à une échelle plus universelle.
-Quand on fait les Beaux-Arts, on est complètement libres, peut-être trop. Mais cela donne une grande liberté et une grande ouverture d’esprit.
-Le regard artistique du designer : c’est le plus important. Le dessin apporte un nouvel usage, une nouvelle manière de voir les choses. On n’invente rien, mais on réinvente. Tout est design, tout est dessiné. C’est un œil avec ses codes, ses couleurs, ses vocabulaires de formes.
-J’étais plus jeune dans la volonté de faire un design démocratique, mais c’est moins facile quand on produit en France. Un produit qui parle à tout le monde, à la fois à quelqu’un d’érudit et à quelqu’un qui n’y connaît rien ; c’est un vrai plaisir.
-J’ai dessiné un sex-toy édité par Love to Love et vendu par Rykiel. On est venu me chercher pour mon travail sur le silicone phosphorescent. Cela m’a beaucoup amusé. Je voulais un objet qui puisse se montrer, qui n’est pas forcément caché, avec une fonction : stimuler le corps de la femme. J’ai eu un stand sur Maison et Objets en « Art de vivre ».
-J’ai toujours eu mon nom sur les objets que j’ai dessinés, car je n’ai pas travaillé dans une agence pour quelqu’un.
-Le design : c’est un métier qui n’est pas référencé ; ce n’est pas comme un architecte : le prix dépend de la notoriété du designer. La question des royalties n’a pas de base. La question de la négociation est clé. Je pense qu’il faudrait clarifier le statut des designers. Beaucoup de designers travaillent avec des avances sur royalties.
Questionnaire de Proust :
Occupation idéale
NAGER
Le pays où j’aimerais vivre
Il n’existe pas … hélas
Un /des Créateurs (au sens large)
Joe Colombo, Louise Bourgeois, Charlotte Perriand, David Bowie
Et beaucoup d’autres
Mes héros-héroïnes fiction/vie réelle
Wonder woman – Mick Jagger
Ce que je déteste le plus
L’INTOLÉRANCE, le mensonge … les convictions
Ce que j’apprécie le plus chez les autres
L’humour, l ’humilité
L’état présent de mon esprit
JOYEUX
La faute qui m’inspire le plus d’indulgence
La vengeance
Ma devise
Ce qui est fait n’est plus à faire
Le monde de demain en quelques mots ?
Bi polaire, ultra numérique et aseptisé d’un coté et sauvage et débridé de l’autre côté
Commentaires récents