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LE TRAIT- Episode 57- Laurence Benaïm, le goût des autres

LE TRAIT- Episode 57- Laurence Benaïm, le goût des autres

LE TRAIT- Episode 57-Laurence Benaïm, le goût des autres



Nous cherchions à interviewer Laurence Benaïm depuis près d’un an. Mais avec autant de casquettes : journaliste (elle a travaillé pour Le Monde, L’Express et fondé Stiletto), auteure, éditrice, biographe (Saint-Laurent, Marie-Laure de Noailles, Dior…) et une nouvelle biographie de la peintre italo-argentine Leonor Fini, à paraître, en septembre, chez Gallimard, l’entretien a finalement eu lieu au début de l’été, à l’hôtel Nolinski (Paris 1er), un lieu qu’elle connaît bien. Elle y organise régulièrement des rencontres avec des designers et des créateurs, portée par le désir de transmettre son goût des autres, et en particulier des créateurs, qu’elle soutient avec une passion indéfectible…

Dans son roman « La sidération », paru en 2021, Laurence Benaïm raconte son histoire familiale et évoque son grand père maternel polonais qui fabriquait des chapeaux et qui lui a, peut-être, transmis le goût de l’artisanat :« J’aime la vérité et le silence des ateliers, la vérité des gestes, les instruments, les mots de la technique qui sont les complices de la main». Elle retrace l’histoire de ses parents médecins, juifs séfarades du côté de son père (Algérie) et ashkénazes du côté maternel. Sa mère, installée à Paris durant la Seconde Guerre mondiale, doit se cacher à la campagne ; un épisode qu’elle ne racontera jamais vraiment. Sa mère ne se confiait d’ailleurs pas beaucoup et c’est son histoire, en particulier, que Laurence Benaïm s’attache à retracer dans ce roman alors qu’elle tombe gravement malade. « C’est un livre écrit sous forme d’une grande lettre : ce que je n’ai pas pu lui dire ».

Laurence Benaïm a, en effet, voulu « documenter », dit-elle, l’histoire de sa mère à la façon dont elle « documente » ses biographies : un travail d’enquête « Tout savoir, s’imprégner pour arriver à quelque chose de poétique ». La biographie de Saint-Laurent, qui est devenue un ouvrage de référence, lui a demandé sept ans de travail. Elle cite comme modèle Stefan Zweig et Pierro Citati.

Laurence Benaïm est aussi la biographe du décorateur d’intérieur Jean-Michel Frank (1895-1941). Elle le raconte joliment : « Le personnage s’est imposé car j’aime les grands silencieux : il était à la fois célèbre et inconnu. Il n’a pas vraiment donné d’interviews. Son travail a finalement été extrêmement copié et a, en même temps, quelque peu disparu. Il n’a fait partie d’aucun groupe, il était solitaire. J’ai été attiré par cette personnalité. Jean Cocteau disait qu’il donnait l’impression que ses intérieurs avaient été cambriolés. Il y a dans ses créations une forme d’opulence dans la retenue, une grande sensualité associée à une grande rigueur. Une épure qui est la grâce mais n’est pas de la raideur ou du minimalisme. Comme un tailleur de diamants, il enlève pour ajouter de la lumière. Même son dépouillement a quelque chose de solaire ».

Laurence Benaïm aime autant l’extravagance que la retenue quand ils sont, l’un ou l’autre « au service d’un propos ou d’une intention. Je n’aime pas les choses obligatoires ou imposées, sans regard ».

Elle a récemment apprécié le travail d’Edi Dubien au Musée de la Chasse. Elle aime aussi Claire Tabouret, « une artiste qui cultive le sens du trait et du regard », ainsi que Jean-Philippe Delhomme.

Dans cet épisode du Trait, Laurence Benaïm nous raconte son parcours et évoque son travail en prenant toujours soin de choisir ses mots, ce qui finalement l’importe plus que tout.

VERBATIM

« J’apprends avec le temps à essayer de me délester de mes notes de lecture, qui sont comme des épingles accrochées à des robes.

-Le créateur, c’est celui qui dessine, qui a des idées, les met en scène, raconte des histoires.

L’artisan, c’est le premier d’atelier qui peut tout changer à cause d’un entoilage.

-La virtuosité, j’essaie de la mettre dans les mots.

– « La sidération » ; c’est un livre écrit sous forme d’une grande lettre : ce que je n’ai pas pu dire à ma mère. On se parlait assez peu.

-J’ai découvert la haine que mes parents avaient pu subir. L’offense aussi que mon père avait endurée en tant que juif et interne des hôpitaux de Paris. Cela continuait bien après la fin de la guerre.

-J’ai besoin de documenter, d’accumuler des pièces à conviction, un travail presque de profilers, dont je me sens proche car ils ont des obsessions jamais satisfaites.

-Je suis pétrie, nourrie par les grands écrivains du XIXe siècle, l’esprit naturaliste, celui de Zola, Maupassant, qui consiste à tout savoir pour parvenir à quelque chose de poétique. S’imprégner. J’ai besoin de cela.

-Jean-Michel Frank : Il célèbre son époque, la lumière de cette époque, sans être dans la négation du passé. L’histoire, pour lui, est comme un continuum, là où d’autres cherchent à l’annuler. J’aime cela chez lui. Comme un tailleur de diamants, il enlève pour ajouter de la lumière. Même son dépouillement a quelque chose de solaire. Il crée des lieux pour y vivre ».

 

Questionnaire de Proust :

Le pays où j’aimerais vivre

 Celui des trois r: rêves, rencontres, rires 

Un /des Créateurs (au sens large)

Celui qui met au quotidien et dans chacune de ses œuvres,  un trait d’esprit,de caractère et  d’imagination 

Une couleur

 Le bleu changeant du ciel 

Mes héros-héroïnes fiction/vie réelle

Des yeux pour voir

 

Ce que je déteste le plus

 La mauvaise foi 

Ce que j’apprécie le plus chez les autres

La capacité à survivre à ce qu’on ne peut ni pardonner ni oublier 

L’état présent de mon esprit

 La joie de retrouver ceux que j’aime 

La faute qui m’inspire le plus d’indulgence

 Je les évite et me rends compte combien je suis sans pitié 

Ma devise

  Celle d’Yves Saint Laurent : il n y a pas d’élégance sans élégance de cœur    

Le monde de demain en quelques mots ?

Celui qui retrouverait le goût, l’ individualité des choix et le courage, plutôt que l’uniformisation par le renoncement et la soumission.

LE TRAIT- Episode 56- A l’hôtel avec Natacha Froger

LE TRAIT- Episode 56- A l’hôtel avec Natacha Froger

LE TRAIT- Episode 56- A l’hôtel avec Natacha Froger

 

Le Trait poursuit sa réflexion sur le design et l’« hospitalité » avec Nathalie Froger, architecte d’intérieur chez ATOME associés. Elle nous partage sa vision dans cet épisode.Issue d’une école d’arts appliqués, Natacha Froger a toujours souhaité évoluer dans ce secteur.

L’emblématique collaboration entre la designer André Putman et Ian Schrager, co-fondateur du célèbre Studio 54, qui a donné naissance au légendaire hôtel Morgans à New York en 1984, a profondément inspiré son choix de carrière. Cet hôtel a marqué une rupture majeure dans le monde de l’hôtellerie, en réinventant les codes de l’accueil.

Natacha Froger explique également l’équation économique singulière qui régit le secteur hôtelier et la résilience dont cette industrie a su faire preuve depuis la crise COVID-19. Elle souligne aussi la nécessité d’offrir une expérience unique, portée par la création d’un lieu doté d’âme et de sens, notamment grâce à la collaboration avec un architecte d’intérieur.

Selon elle, les hôteliers ont compris qu’ils doivent aller plus loin. « Et nous, concepteurs, avons un rôle clé à jouer dans cette transformation. »

 

VERBATIM

« Je suis profondément attachée à cette notion de « ville dans la ville ». Un hôtel est un lieu qui rassemble toutes les fonctions essentielles : l’accueil, la restauration, le bien-être, le travail. C’est un écosystème à part entière.
L’hôtellerie se décline selon des positionnements économiques très variés, du plus accessible au grand luxe. Notre défi est de concevoir un produit qui réponde précisément aux attentes d’un segment défini, tout en conservant une ambition d’excellence.

-Ce que j’ai toujours recherché dans mes équipes, ce sont des profils pluriels, des talents venus d’horizons différents, capables d’enrichir le projet par la diversité de leurs regards.


-Le programme est la colonne vertébrale du projet. Il intègre toutes les données économiques et de gestion nécessaires à l’exploitation de l’hôtel. C’est sur cette base solide que l’on conçoit un produit cohérent, désirable, et surtout pérenne. Il ne s’agit pas seulement de créer un bel objet, mais de proposer un outil de travail performant pour l’exploitant. »

 

Questionnaire de Proust :

Occupation idéale

La course automobile. 

Ma passion pour la vitesse trouve ses racines dans un rêve d’enfant : celui de devenir pilote de chasse. L’aéronautique et la course automobile sont des domaines où chaque détail compte, où l’esthétique et la performance sont inextricablement liées. 

J’aspire à capturer cette énergie dans mes projets, cette tension entre la maîtrise technique et la liberté créative, pour créer des espaces qui sont à la fois beaux, fonctionnels, et profondément inspirants.

Le pays où j’aimerais vivre

Pas un, des pays. 

Citoyenne du monde et passionnée par sa richesse culturelle, j’aurais aimé pouvoir partager mon temps entre plusieurs pays en y établissant résidences, l’Argentine, le Brésil, la Chine, le Japon … toute la magie des rencontres et des histoires où mes voyages et mes projets m’ont menée pendant toutes ces années.

Un /des Créateurs (au sens large)

Andrée Putman … , la rencontre inspirante de mon enfance.

Andrée Putman inaugurait le MORGANS à New York. Je découvrais grâce à elle tout à la fois l’univers de l’hôtellerie, avec une nouvelle génération d’hôtels, la naissance du concept « hôtel boutique » et le métier d’Architecte d’intérieur.

 

Hilton MC Connico … L’ami solaire

J’ai une profonde admiration pour Hilton, tout autant pour l’artiste que pour l’Homme, un créateur riche et pluriel à l’incroyable générosité.

Sa poésie, sa délicatesse et son humour tissaient ses créations comme son quotidien. Sa maxime « je veux mourir d’une overdose de vie », m’accompagne au quotidien.

P. Zumthor … l’Artisan 

Ma rencontre avec son travail fut celle des thermes de VALS. Une ambivalence émotionnelle, un vertige, générés par la radicalité et l’épure architecturale associées à la maitrise de la lumière et la sensualité des volumes.

 

H. Matisse … Le Maître 

Ma première émotion picturale. Son geste essentiel raisonne avec mon goût de l’épure. Cette simplicité évidente dans la traduction du vivant démontre son incroyable dextérité. Sa maîtrise de la couleur me ramène à ma culture et mes racines méditerranéennes. Son incontournable JAZZ, un chef-d’œuvre, me connecte à ma culture musicale et à cette liberté aérienne.

 

Une couleur :

*International Klein Blue* (IKB)

Yves Klein a poussé l’exploration de la couleur, intense et uniforme, offrant une échappatoire à la matérialité. Cette qualité d’infini et d’expansion est précieuse dans mon travail.

Mes héros-héroïnes fiction/vie réelle

Les héros-héroïnes de l’ombre, ceux et  celles qui font de notre quotidien et de cette planète un monde meilleur … 

Une héroïne aussi, Audrey Hepburn. Sa capacité à incarner la joie de vivre, sa force, son élégance et son espoir face aux défis de la vie sont une source constante d’inspiration.

Hepburn disait : « Je crois que demain est un autre jour et je crois aux miracles. » Cette déclaration illustre sa foi inébranlable dans le renouveau nous encourageant à rester ouverts à tous les possibles.

 

Ce que je déteste le plus

Le mensonge et la couardise, tant dans ma vie personnelle que professionnelle car ils compromettent la confiance, détériorent les relations et engendrent le conflit.

Ce que j’apprécie le plus chez les autres

La bienveillance et la générosité qui impliquent une ouverture d’esprit et une volonté de soutenir les autres en favorisant une écoute active.

L’état présent de mon esprit

La joie de vivre comme un éclat de rire, essentielle, car elle me rappelle à la légèreté et l’humour, un espace ludique de spontanéité, et de partage.

Cet éclat de rire permet de relativiser les défis et les obstacles, en restant toujours positif.

La faute qui m’inspire le plus d’indulgence

Celle que l’on reconnait …

En admettant ses erreurs, nous faisons preuve d’humilité et d’intégrité, ce qui suscite naturellement la compréhension et le pardon. Reconnaître ses fautes témoigne de notre volonté de s’améliorer.

Ma devise

« La sagesse, c’est d’avoir des rêves suffisamment grands pour ne pas les perdre de vue lorsqu’on les poursuit. » Oscar Wilde 

Le monde de demain en quelques mots ?

Idéaliste, je veux croire que le monde de demain sera enfin celui de l’intérêt commun où les conflits auront cédé la place au dialogue et où enfin l’homme prendra pleinement conscience du merveilleux de la planète qu’il habite.

Je rêve d’un avenir harmonieux et équitable où la créativité deviendra essentielle pour résoudre les défis complexes et laisser la place à des solutions innovantes tout en s’inspirant et en respectant les cultures et les traditions anciennes. 

Un futur où le rêve et le développement durable se rencontreront pour créer des environnements enrichissants et respectueux, façonnant notre manière de vivre, de travailler et de coexister de façon positive.

LE TRAIT- Episode 55- Alias Mathias

LE TRAIT- Episode 55- Alias Mathias

LE TRAIT- Episode 55 – ALIAS MATHIAS

Le Trait a rencontré le « créateur » Mathias, au salon « Révélations », qui a eu lieu au Grand palais en mai dernier.
Mathias est le nom qu’il a emprunté à vingt-neuf ans pour repartir à zéro. Il s’est alors installé comme artisan rue de Charenton (12e ) : « Cela a été quinze ans de labeur ; une période très perturbante, très difficile. Je me suis toujours dit que si je m’en sortais, j’aiderais les jeunes ». Il a tenu sa promesse en lançant l’association « Matières libres » en 2015 qui, chaque année, octroie le Prix Mathias doté d’une somme de 6000 euros, ouvert aux jeunes créateurs de moins de 30 ans sortant d’écoles ou autodidactes. Le jury est choisi parmi des personnalités des arts appliqués, du design, de la décoration, des médias ou chefs d’entreprise. L’originalité, le savoir-faire et la liberté créative sont particulièrement récompensés. Depuis 2023, la maison Baccarat (avec laquelle Mathias collabore depuis toujours comme designer) décerne aussi le prix « Alchimie de la joie », une résidence d’un mois à la manufacture Baccarat (Meurthe-et-Moselle). Il est encore possible de candidater pour le prix 2025 (jusque fin juillet, lien ci-dessous).

Pour Mathias, la découverte du verre a été capitale. Il trouve un procédé qui, pendant 15 ans, lui permet de « faire la plus belle verrerie du monde, après on m’a copiée. Mais, je me suis rendu compte que je pouvais utiliser d’autres matières. J’ai fait des couverts, des nappes … La griffe Matthias était partout ». Mathias estime que les jeunes designers doivent résister et imposer leur signature, même si c’est difficile.

Matthias a accepté de nous raconter avec passion et une grande émotion son parcours…

La liste des exposants 2025 de Révélations

institut-savoirfaire.fr/sites/default/files/brochure_-_mathias_matieres_libres_2019.pdf

VERBATIM
« J’ai commencé en 1972 au fond d’une cour d’immeuble. J’étais heureux mais le défi est de réussir et d’être reconnu.
-La parution dans un magazine vous donne la reconnaissance mais ne vous fait pas vivre. À l’époque, on n’avait pas les réseaux sociaux pour se faire connaître.
– J’ai pris l’appellation : Créations Mathias. Pour moi, création, c’était le mot essentiel de la vie. Mais personne ne l’utilisait à l’époque. Je ne me dis pas designer, c’est un terme anglais qui n’a rien à faire avec ce que l’on fait. Le mot designer ne rend pas compte du métier de la main. Je ne me revendique pas artiste. Dès que l’on produit en multiple, nous ne sommes plus des artistes ».

Questionnaire de Proust :

Le pays où j’aimerais vivre

Le mien

Un /des Créateurs (au sens large)

Barbara Heptworth

Une couleur :

Cardinal

Mes héros-héroïnes fiction/vie réelle

Mahatma Ghandhi

 

Ce que je déteste le plus

L’hypocrisie

Ce que j’apprécie le plus chez les autres

La Créativité

L’état présent de mon esprit

Perpetuelle état de reflexions, ….curieux,passionné, ….tout en restant au plus profond de moi serein

La faute qui m’inspire le plus d’indulgence

Quand elle est naivement sincère

Ma devise

Rien n’est impossible ….
Toujours aller au delà de ses propres possibilités ….

Pour Gandhi ce j'admire en lui est...

Rendre libre tout un peuple de plus d’un milliard d’individus uniquement par la force de l’esprit …..

LE TRAIT- Episode 53-Stéphanie Ledoux et Réda Amalou

LE TRAIT- Episode 53-Stéphanie Ledoux et Réda Amalou

LETRAIT -Episode 53- Stéphanie Ledoux et Réda Amalou : En mode workshop

Ce nouvel épisode du Trait met en lumière le Réda Amalou et Stéphanie Ledoux à la tête de l’agence AW2 (pour Workshop Architecture). Réda Amalou, diplômé de l’Université de East London, fonde l’agence en 1997, avant que Stéphanie Ledoux, diplômée de l’École Spéciale d’Architecture de Paris, ne le rejoigne en 2000. Le premier projet de l’agence s’avère déterminant et fondateur: des médecins français leur confient la création d’un hôpital au Vietnam. Ce projet représentait à la fois un risque, comme le raconte Réda Amalou, mais aussi une formidable opportunité. « En tant qu’architectes, nous ne sommes ni hôteliers ni médecins, et ces types de bâtiments, avec leur fonction très forte, imposent des contraintes spécifiques. Mais nous croyons que l’architecture peut créer des espaces qui redéfinissent les lieux et modifient notre manière de les appréhender. » D’autres projets hôteliers, cette fois, ont suivi.

Les deux architectes partagent une vision forte de leur métier, centrée sur la nécessité de remettre la beauté au cœur de l’architecture. Cette démarche se reflète dans les projets de l’agence, visibles sur leur site. « Nous avons trop longtemps imaginé que l’architecture devait répondre à une idéologie, fondée sur des principes rigides. La réalité, c’est que ces principes étaient appliqués de manière systématique. L’architecture, pour nous, n’est pas une question d’idéologie, mais d’idées. Cette quête du beau et de l’esthétique s’incarne dans le lien émotionnel que nous tissons avec l’utilisateur et l’espace. Nous ne cherchons pas à définir ce qu’est le beau, mais à atteindre quelque chose qui nous semble à la fois sensible et intelligent ».

Parmi les architectes qui les inspirent, il y en particulier le Sri-lankais Geoffrey Bawa (1019-2003) qui incarne, pour eux, cette sensibilité du lieu, la prise en compte du contexte naturel et végétal. Reda Amalou et Stéphanie Ledoux insistent d’ailleurs beaucoup sur le lien entre l’architecture et la vie qui fait que « nous allons atteindre le beau. Il y a un lien avec la scénographie : mettre en place les perspectives, le rapport au vide à la matière, à la lumière… ».

 

Verbatim

« Le workshop est essentiel pour nous. C’est le lieu où nous créons, où nous fabriquons, où nous rendons les idées tangibles. La création de réalité est un élément clé pour nous, car c’est ce qui nous pousse à construire, et non à réaliser des œuvres d’art. C’est là toute la différence entre un artiste et un architecte. Nous nous inscrivons dans la réalité vécue, perçue et émotionnellement ressentie.

-Nous ne voyons pas l’architecture comme une spécialisation technique, mais comme une discipline consacrée au dessin de l’espace.

-Les études d’architecture nous semblent être les plus complètes, car elles sont à la fois généralistes et intensives sur le plan de l’apprentissage. Elles nous aident à nous libérer des contraintes et des conventions. Le défi technique, pour un architecte, se résout avec l’expérience. Le véritable enjeu, c’est la liberté de concevoir.

-Le beau : nous ne cherchons pas à définir ce qu’est le beau, mais à atteindre quelque chose qui nous semble à la fois sensible et intelligent.

-Le premier conseil aux jeunes : ne pas s’autocensurer. La première des portes à franchir ; c’est celle qu’on oppose à soi-même ».

-La culture française est profondément ancrée dans le marché public, un système où les autorités publiques jouent le rôle de donneurs d’ordre et de maîtres d’ouvrage. Ce modèle suscite l’admiration du monde entier. Pour notre part, nous avons choisi de nous tourner vers l’international, car ce sont principalement nos contacts qui nous ont orientés dans cette direction.

-ll y a en France l’idée que l’architecte a une responsabilité vis-à-vis du public. En France, il y a obligation de recourir à un architecte pour certains projets ; ce n’est pas forcément le cas dans d’autres pays.

Questionnaire de Proust :

Occupation idéale

Observer

Le pays où j’aimerais vivre

La France

Un /des Créateurs (au sens large)

Robert Rauschenberg

 

Mes héros-héroïnes fiction/vie réelle

Les femmes de ma famille
depuis plusieurs générations

Une couleur

Tout en nuances

Ce que je déteste le plus

Les tics de langage « c’est en cours »

Ce que j’apprécie le plus chez les autres

Leur curiosité

L’état présent de mon esprit

Déterminé

 

La faute qui m’inspire le plus d’indulgence

 Il vaut mieux pécher
par excès que par défaut

 

 

Ma devise

Insister c’est exister

Dîner idéal

 Celui que j’ai eu le temps de cuisiner moi-même

Le monde de demain en quelques mots ?

Résistance

Questionnaire de Proust :

Occupation idéale

Observer

Le pays où j’aimerais vivre

La France

Un /des Créateurs (au sens large)

Robert Rauschenberg

 

Mes héros-héroïnes fiction/vie réelle

Les femmes de ma famille
depuis plusieurs générations

Une couleur

Tout en nuances

Ce que je déteste le plus

Les tics de langage « c’est en cours »

Ce que j’apprécie le plus chez les autres

Leur curiosité

L’état présent de mon esprit

Déterminé

 

La faute qui m’inspire le plus d’indulgence

 Il vaut mieux pécher
par excès que par défaut

 

 

Ma devise

Insister c’est exister

Dîner idéal

 Celui que j’ai eu le temps de cuisiner moi-même

Le monde de demain en quelques mots ?

Résistance

Le Trait Episode 54- Nathalie Obadia : Galeriste puissante

Le Trait Episode 54- Nathalie Obadia : Galeriste puissante

LE TRAIT- Episode 54 –

Nathalie Obadia : galeriste puissante

La réputation de Nathalie Obadia n’est plus à faire. Déterminée, énergique et passionnée, elle incarne pleinement ces qualités lorsque nous la rencontrons dans sa galerie du Faubourg Saint-Honoré, un matin d’avril.

Nous souhaitions l’interroger sur son parcours de galeriste, entamé il y a un peu plus de 30 ans, en 1993, lorsqu’elle ouvre sa première galerie, rue de Normandie (Paris 3e), ainsi que sur son livre récemment paru aux éditions Cavalier bleu, « Figures de l’art contemporain. Des esprits conquérants ».

Nathalie Obadia s’est imposée dans le cercle très fermé des galeristes. Elle raconte qu’à 13 ans déjà, elle visitait des galeries engageant des conversations avec Mathias Fels, Jean-Marc Lambert et d’autres figures du milieu. Daniel Varenne a même vendu à ses parents une œuvre de Tom Wesselmann. Passionnés d’art, ses parents ont commencé une collection de pop art. Bien qu’elle vienne d’un milieu sans grande fortune, l’art y occupait une place centrale. Selon elle, la démarche de ses parents était atypique pour l’époque car les acheteurs étaient principalement issus de grandes dynasties familiales.  Elle est convaincue qu’il est aujourd’hui possible de constituer une collection sans nécessairement disposer de moyens considérables, mais en nourrissant une grande curiosité (mot qui reviendra souvent dans la discussion).

Elle entreprend des études de droit puis Sciences po, mention relations internationales (école qu’elle a d’ailleurs retrouvée pour donner un cours sur l’analyse du marché de l’art contemporain). Après ses études, Nathalie Obadia effectue plusieurs stages, notamment chez Maeght avant de se lancer dans l’aventure d’une galerie.

Nathalie Obadia dégage une impression de mouvement constant, de vigilance, malgré son succès. Mot qu’elle réfute d’ailleurs fermement : « Je ne vois pas mon parcours comme un succès. Il y a encore tellement à faire. Le métier a beaucoup évolué. Il n’y a pas de rente de situation. Chaque matin est un défi. Il faut trouver des projets pour les artistes que l’on défend, inventer des ventes, susciter des envies mais assi bien connaître son environnement à la fois national et international. »

Dans son ouvrage « Figures de l’art contemporain », Nathalie Obadia aborde un sujet essentiel : la nécessité de canaux de légitimation dans le monde de l’art, en particulier avec l’émergence de l’art conceptuel. Elle situe cette rupture à la fin des années 1960 : « On s’est progressivement éloigné de la notion de beauté kantienne. Un objet peut devenir une œuvre d’art, mais ce n’est pas automatique. Il faut des intermédiaires pour le légitimer comme par exemple les curateurs ».

Lorsqu’on lui demande si l’art conceptuel ne va pas parfois trop loin, elle répond qu’il existe plusieurs voies possibles pour un artiste. Et c’est le temps qui tranchera : « Il ne restera que les bons ».



VERBATIM

« À 15-16 ans, j’ai fait des stages chez Adrien Maeght, en Italie, chez des marchands, et chez Daniel Varenne qui avait vendu à mes parents une œuvre de Tom Wesselmann.

-J’ai préféré faire des études plus classiques en droit, en sciences politiques et en relations internationales.

-Le rôle du galeriste, c’est un peu celui d’un agent d’art. Je choisis de défendre un artiste. J’influence les gens influents : curateurs, critiques d’art, collectionneurs prescripteurs. Mon rôle est de faire avancer la cause des artistes que je défends auprès de ces personnes. Une galerie de haut niveau a accès aux grandes foires, aux collectionneurs importants, aux musées.

-On peut aussi redécouvrir un artiste. Cela a été le cas pour Martin Barré, qui est décédé en 1993. Je le connaissais de son vivant et en 2006, son épouse, Michelle Barré, m’a demandée de le défendre et de le remettre sur la scène de l’art contemporain. Nous pouvons redonner une nouvelle lumière à un artiste.

-Je ne vois pas mon parcours comme un succès. Il y a encore beaucoup à faire. Le métier a beaucoup changé. Il n’y a pas de rente de situation. Chaque matin est un défi. Il faut trouver des projets pour les artistes que l’on défend, inventer des ventes, susciter des envies. Il faut bien connaître son environnement national et international. Parfois, on se dit : cette personne ne le sait pas encore, mais ce tableau est pour elle.

-La sociologie des collectionneurs en France a beaucoup évolué. Aujourd’hui, il y en a beaucoup. Il faut savoir les trouver. Avant, la majorité des collectionneurs étaient issus de grandes familles fortunées. Mes parents, qui n’étaient pas riches ni issus de réseaux, étaient des exceptions. Aujourd’hui, la plupart des collectionneurs, à Paris comme en province, sont des « personnes normales ».

-L’Europe est un marché très fort (Belgique, Allemagne, Italie, France…). Paris, après New York, reste le centre névralgique de l’art contemporain.

-J’ai pu me tromper, et c’est normal. Les meilleures galeries se trompent moins, mais je n’ai jamais montré un artiste que je n’appréciais pas. En règle générale, les artistes que je défends sont des personnalités très fortes.  Au-delà du travail, ce qui compte, c’est l’envie d’avancer, de réussir, de s’épanouir, et de répondre à la complexité actuelle du monde de l’art.

-La nouvelle génération d’artistes français est beaucoup plus autonome, ils connaissent les codes. Cela ne remet pas en cause l’authenticité de leur travail ».

Questionnaire de Proust :

Occupation idéale

Observer

Le pays où j’aimerais vivre

La France

Un /des Créateurs (au sens large)

Robert Rauschenberg

 

Mes héros-héroïnes fiction/vie réelle

Les femmes de ma famille
depuis plusieurs générations

Une couleur

Tout en nuances

Ce que je déteste le plus

Les tics de langage « c’est en cours »

Ce que j’apprécie le plus chez les autres

Leur curiosité

L’état présent de mon esprit

Déterminé

 

La faute qui m’inspire le plus d’indulgence

 Il vaut mieux pécher
par excès que par défaut

 

 

Ma devise

Insister c’est exister

Dîner idéal

 Celui que j’ai eu le temps de cuisiner moi-même

Le monde de demain en quelques mots ?

Résistance